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C’est cependant pour la majorité des Juifs un rendez-vous exceptionnel. Même si, pour la plupart, ils sont incapables d’expliquer pourquoi Yom Kippour représente pour eux quelque chose de si profond, nombreux sont ceux qui éprouvent le besoin, ne serait-ce que ce jour de l’année uniquement, de se rendre dans une synagogue. Pour un certain nombre de Juifs, les offices de Yom Kippour (et plus particulièrement l’office de Kol Nidré, le premier soir, dont nous reparlerons plus loin dans ce chapitre) sont une occasion de se dire « je reste juif, même si je ne sais pas ce que cela signifie ». Pour d’autres, Yom Kippour est le point culminant de l’année, un jour qui semble triste mais qui élève, un jour qui leur procure un sentiment extraordinaire de libération, d’unité spirituelle et de lâcher-prise. Demander pardon à Dieu Si Yom Kippour est un jour où l’on tente de se libérer des rancunes, de se faire pardonner et de communier avec autrui, c’est aussi un important moment pour demander pardon à Dieu. Yom Kippour est appelé le shabbat des shabbats, et selon la tradition, c’est le jour de l’année où Dieu entérine le jugement prononcé à Rosh Hashanah (voir chapitre 18). Yom Kippour, c’est la dernière chance pour changer, pour se repentir et pour expier avant le jugement dans l’espoir qu’il soit annulé – en appel, comme dit précédemment – au cas où il serait défavorable. D’après le Talmud, il n’est pas possible de pécher en se disant qu’on sera pardonné à Yom Kippour. On ne peut échapper à l’important travail de réconciliation avec soi-même, avec sa famille, avec ses voisins, etc. Le but de tout cela est de changer, de grandir et de progresser. Les sages juifs de l’Antiquité disaient qu’on ne s’est jamais entièrement repenti que lorsqu’on s’est retrouvé deux fois confronté à la tentation de commettre le même péché et que l’on a deux fois refusé de le commettre. Yom Kippour est traditionnellement le dernier jour pour l’expiation, mais la tradition dit que les portes du repentir restent toujours ouvertes : il n’est jamais trop tard. Cependant, s’il n’existait pas une échéance au moins symbolique, qui s’en soucierait véritablement ? Un poulet émissaire Dans toutes les cultures religieuses, on trouve des rites d’expiation. Ils jouent un rôle très fondamental dans la psyché humaine tout comme dans l’organisation des sociétés. Le philosophe René Girard a clairement démontré l’importance de ces rites pour la paix sociale, notamment celui du bouc émissaire. À Kippour, jadis, ce rite était au centre de la célébration de la fête (voir plus loin). Ce rite n’existe plus. En revanche, une coutume est apparue : celle du poulet expiatoire (en hébreu kapparah) : la cérémonie des kapparot. Elle a lieu la veille de Kippour. Il s’agit de prendre un coq ou une poule dans une main, un livre de prières dans l’autre, et de réciter des textes sollicitant le pardon divin en faisant tourner l’animal trois fois au-dessus de sa tête. On prononce alors une formule d’exorcisme : « Que celui-ci soit mon pardon et mon expiation. » L’animal, comme dans tous les rites de substitution, est censé prendre sur sa tête les malédictions potentielles auxquelles chacun est exposé. Puis, l’animal est donné aux nécessiteux. Cet usage n’est pas universellement pratiqué chez les Juifs. De célèbres rabbins l’ont condamné en y voyant une pratique païenne. Très souvent, en guise de kappara, les fidèles préfèrent donner de l’argent aux pauvres. En fin de journée, on prend en famille un repas substantiel pour affronter la plus grande solennité de l’année : le jeûne de Kippour. Ce mot est le même que kappara : il signifie expiation, comme dit dans la Bible : « Car ce jour-là, Dieu vous purifiera de toutes vos fautes. Elles seront toutes expiées. ». La célébration de Yom Kippour Ce qui caractérise la plupart des fêtes juives, c’est ce qu’on est censé faire ce jour-là ; au contraire, Yom Kippour se caractérise par ce qu’on est censé ne pas faire. Selon la tradition, cinq abstinences doivent être respectées : ne pas manger ni boire, ne pas prendre de bain, ne pas se parfumer, s’abstenir de relations sexuelles et de porter du cuir. C’est pourquoi, il vous arrivera quelquefois de rencontrer dans la rue des Juifs allant à la synagogue et portant des chaussures de tennis. Le cuir était considéré dans l’Antiquité comme un signe d’aisance et de luxe. Bien sûr, Yom Kippour étant aussi considéré comme un shabbat, tous les interdits habituels du shabbat s’appliquent (voir chapitre 17). Pourquoi jeûner ? La tradition juive considère que l’homme est fortement tributaire de ses divers besoins, au premier rang desquels on compte celui de manger. Les exigences du corps l’emportent ainsi souvent sur celles de l’âme. En jeûnant, on réduit l’importance du corps dans notre vie. Les rabbins enseignent que les anges n’ont aucun besoin physique. Par ailleurs, ils ne commettent pas de fautes. À Yom Kippour, on s’efforce par conséquent de ressembler aux anges : on ne mange ni ne pèche. En jeûnant, non seulement le fidèle allège le poids de son corps pour que son âme se sente plus légère, mais de plus, il sanctionne en quelque sorte la matérialité de la vie et ses séquelles spirituelles. Le jeûne de Kippour dure vingt-cinq heures : du coucher du soleil la veille, jusqu’à la tombée de la nuit le lendemain. En principe, ce jeûne est obligatoire pour les garçons à partir de 13 ans et les filles à partir de 12 ans. L’usage veut que dès l’âge de 10 ans, on habitue les enfants à jeûner au moins quelques heures, voire plus. En cas de maladie, et en fonction de la gravité de la situation du malade, il n’est pas obligé de jeûner. C’est également le cas pour les femmes qui viennent d’accoucher. Chose intéressante : les rabbins du Talmud enseignent qu’il faut s’adresser non pas à un rabbin, mais à un médecin pour dire quel type d’alimentation est autorisé au malade. En cas de danger grave, le jeûne est purement et simplement suspendu. En fait, ici, ce sont les médecins qui sont les rabbins. Quand Yom Kippour commence Après le dîner, on allume les bougies comme pour toute fête et l’on dit : Barouh’ atah Adonaï, Elohenou Meleh’ haolam, asher kideshanou bemitzvotav vetzivanou lehadlik ner shel Yom haKippourim. « Béni sois-Tu, Éternel notre Dieu, Roi de l’univers, qui nous a sanctifiés par tes commandements et nous a ordonné d’allumer les lumières de Yom Kippour. » En plus des bougies habituelles des fêtes, certains allument aussi des bougies de vingt-quatre heures (voir chapitre 9) en souvenir des membres de la famille qui sont décédés. L’office du soir : le Kol Nidré Le soir venu, les fidèles se rendent à la synagogue, les uns s’habillent en blanc, symbole de pureté, et portent quelquefois un kittel : la blouse blanche de leur mariage qui – le plus tard possible – leur servira de linceul. Tous portent ce soir-là le châle de prière, le talith. C’est le seul soir de l’année où on le porte. C’est le symbole de la pureté des anges dont nous avons parlé précédemment. L’office par lequel commence Yom Kippour, le Kol Nidré, est pour les Juifs pratiquants un des moments les plus importants de l’année. Ce nom vient d’un passage de la liturgie chanté pendant cet office. Curieusement, les paroles évoquent davantage un contrat qu’une prière. En fait, le Kol Nidré est un document légal (d’après la loi juive, la partie légale doit être observée pendant qu’il fait encore jour, c’est pourquoi l’office de Kol Nidré commence quand le ciel est encore clair). Si les paroles du Kol Nidré ont certainement de l’importance, c’est surtout sa mélodie lancinante qui impressionne les gens. Elle est la plus connue et la plus emblématique du judaïsme et figure sur de nombreux disques. Un certain nombre de Juifs qui ne connaissent pas l’hébreu, ou très mal (le Kol Nidré est en réalité écrit en araméen), trouvent cette mélodie mystérieusement et profondément émouvante, comme un souvenir de la petite enfance, une enfance qui remonterait à plusieurs siècles dans le passé. Les paroles de cette prière évoquent un problème particulier : celui des vœux que l’on peut faire. Tout au long de l’histoire, les Juifs pratiquants avaient l’habitude de prendre des engagements que la Loi n’exigeait pas, en général, par gratitude pour un miracle qui leur était arrivé ou dans l’espoir d’exorciser un malheur potentiel. Mais la chair est faible. Le roi Salomon lui-même avait dit dans l’Ecclésiaste : « Il vaut mieux ne pas faire de vœux que d’en faire et de ne pas les respecter. » C’est pourquoi les rabbins du Talmud, pour ne pas créer de trop violents sentiments de culpabilité, ont décrété qu’il fallait prononcer une annulation virtuelle des vœux que l’on avait faits. « Tous les vœux, interdictions et obligations de toutes sortes que nous avons prononcés, qu’ils soient nuls et non avenus depuis ce jour de Kippour jusqu’au jour de Kippour de l’année prochaine. » Les termes